Comment protéger son concubin en cas de décès ?

La protection familiale dans le cadre d’un couple marié ou pacsé se crée assez facilement avec la bonne stratégie. Il faut dire que la loi TEPA de 2007 qui a exonéré le partenaire et le conjoint survivant de droits de succession a simplifié les choses. Néanmoins, pour protéger son concubin, la donne n’est pas la même. En effet aux yeux du Code civil et du Code général des impôts, la notion de concubin n’existe pas en droit successoral.

Ce n’est pas le cas en matière d’impôt sur la fortune néanmoins puisque les concubins notoires sont imposés sur la valeur nette totale au 1er janvier.

Afin de protéger le concubin survivant en cas de décès, il va falloir mettre en place certaines stratégies, surtout en présence d’enfants pour s’assurer d’une transmission familiale réussie.

 

Au niveau successoral, le concubin est un tiers

 

Entre personnes non parentes, le Code général des impôts applique un barème de donation et succession de 60%. Autant vous dire que cela freine tout de suite la personne qui souhaite faire une donation à son concubin.

La différence est assez drastique par rapport au mariage et même par rapport au PACS. Dans ces 2 derniers cas, le partenaire ou conjoint sont exonérés de droits de succession ( mais pas de donation). Un leg est alors intéressant sur des biens immobiliers notamment.

Aucune réserve ni aucun droit légal ne peut s’appliquer au profit du concubin. Même si vous n’avez aucun autre héritier, à défaut de testament (et du paiement de 60% des droits…), c’est l’Etat qui deviendrait propriétaire.

Pour transmettre au concubin, il faudra donc une volonté non équivoque par une donation ou un leg. Bien entendu, vous avez la possibilité de prendre à votre charge les droits de donation sans que cela ne soit considéré comme une donation complémentaire. La jurisprudence est constante sur ce point. Mais transmettre un bien d’une valeur de 100 vous coutera en réalité 160.

 

Protéger le concubin avec le logement familial

 

La question devient plus compliquée lorsque vous souhaitez assurer un toit au dessus de la tête du concubin. Encore plus en cas d’enfants d’un second lit puisque les enfants du premier lit pourraient demander leurs droits dans l’indivision.

Dans le cas où le défunt était le seul titulaire du bail, la loi de 1989 prévoit un transfert au profit du concubin notoire. Au sens du BOFIP  » Pour qualifier de concubinage notoire des relations, il convient, conformément aux principes posés par la jurisprudence, de s’attacher à l’existence simultanée des critères de stabilité, de continuité et de notoriété de ces relations. La jurisprudence de la Cour de cassation, antérieure à la loi n° 99-944 du 15 novembre 1999 relative au pacte civil de solidarité , considérait le concubinage comme notoire lorsque deux personnes vivaient publiquement comme mari et femme (Cass. 10 nov. 1924 et 12 mai 1925 ; DP, 1925, I, 125 et 126). »

Dans le cas où les 2 concubins sont sur le bail, le contrat continue.

Néanmoins, si le défunt était propriétaire seul du logement principal, le concubin ne récupère aucun droit et doit quitter le logement. Le défunt peut prévoir un droit d’usufruit au profit du concubin, mais à charge de payer les droits de 60%…

Si les 2 concubins sont propriétaires, alors la résidence principale tombe en indivision avec les héritiers. Ces derniers pourront invoquer le partage. Dans ce cas, le Code civil prévoit dans son article 824 l’attribution éliminatoire. Le concubin pourrait alors donner leur part aux indivisaires.

Pour éviter ces cas de figure, nous pouvons envisager 2 solutions complémentaires:

  • Créer une société qui possèdera le bien avec des statuts qui régissent le cas de la transmission.
  • Chacun des concubins pourra donner à l’autre l’usufruit des parts sociales. Il s’agit d’un démembrement croisé. Ainsi en cas de décès, chacun des époux aura l’usufruit de la totalité du bien.

Attention ! Dans ce dernier cas, il faut s’assurer d’une part que la société soit suffisamment endettée pour éviter que la valeur taxable soit trop importante. En complément, il faut une vraie volonté de protection pour éviter la notion d’abus de droit fiscal. Enfin, il faut prendre garde au fait que la donation ne doit pas porter atteinte à la réserve héréditaire des descendants, sous peine de se voir réduite par l’action en réduction.

 

Pour protéger le concubin financièrement: l’assurance-vie optimisée

 

L’assurance-vie reste encore un moyen efficace pour transmettre un patrimoine financier au concubin.  En effet, pour tous les versements effectués avant 70 ans, vous appliquez l’article 990 I qui prévoit le barème suivant pour chaque bénéficiaire:

  • Entre 0 et 152 500€: pas de droits.
  • Entre 152 501 et 852 500€ : 20%.
  • Au-delà: 31,25%.

Le Code ne parle pas de lien de parenté. Ainsi le concubin bénéficie de ce barème également, le rapprochant de la succession des descendants.

Pour les versements après 70 ans, nous tombons dans l’article 757 B qui exonère les primes jusqu’à 30 500€. Au-delà, les primes sont réintégrées dans les droits de succession. L’intérêt semble moins important.

Pour optimiser vos clauses bénéficiaires, évitez les termes « Mon concubin ». En effet, la notion étant peu reconnue juridiquement, vous risquez une contestation au moment de la transmission. Pour cela, nommez la personne précisément avec nom, prénoms, date et lieu de naissance, adresse. Vous éviterez ainsi toute confusion.

Par ailleurs, n’oublions pas que l’assurance-vie reste hors succession du moment que les primes ne sont pas excessives. Il est donc peu recommandé de placer une part prépondérante dans l’assurance-vie pour transmettre au concubin.

Civilement, les héritiers réservataires risquent de soulever l’action en réduction. Fiscalement, l’administration fiscale risque de ne pas apprécier et de soulever le caractère excessif des primes.